Tous les records de chaleur ont été battus l’an dernier en Belgique, et cette année, ils seraient pulvérisés dans le monde entier. La sécheresse s’invite mais pas seulement. En juillet 21, l’Europe de l’Ouest était inondée. Aujourd’hui, une chose est certaine, le climat n’est plus stable et régulier, la moyenne des températures augmente, tout comme les maximales et minimales. La fréquence des vagues de chaleur s’intensifie. La « belle » saison commence de plus en plus tôt au printemps et se termine de plus en plus tard en automne. La preuve ? Les dates de floraison des arbres. En 40 ans, elles ont gagné une vingtaine de jours de précocité. Le jardinage de Papa est donc révolu. Celui de demain est différent. Il est temps de changer de regard, de faire évoluer les pratiques et mentalités et de mieux écouter la nature. Tandis que les spécialistes cherchent à augmenter la résistance des plantes, les jardiniers en expérimentent de nouvelles et adoptent des gestes inédits.
L’automne, une saison clé
Avec l’été qui joue les prolongations, il n’y a plus aucune hésitation. L’automne est devenu incontournable pour le grand jeu des plantations. Autour du 25 novembre comme le dit le dicton bien connu des jardiniers, « A la Sainte-Catherine, tout bois prend racine », mais aussi dès maintenant et jusqu’en décembre-janvier, s’il ne gèle pas. Les racines des plantes auront tout le loisir de bien s’installer, de se développer sans stress.


Diversifiez, ne mettez pas tous les œufs dans le même panier. Multipliez les espèces et les variétés. Pensez avant tout aux arbres qui rafraichissent l’air ambiant, donnent de l’ombre et apportent de la matière organique ; ils sont les climatiseurs des villes bétonnées et les piliers des petits jardins. Etagez et regroupez les végétaux pour éviter les coups de soleil. Les échaudures des branches, – nécroses des tissus dues à des températures trop élevées -, les taches brunes sur les fruits ou les feuilles sèches, recroquevillées, qui tombent prématurément. Au pied des arbres, installez des plates-bandes de vivaces pour éviter le piétinement et renforcer l’humidité ainsi que des plantes couvre-sol aux multiples avantages.

Mieux choisir
Ne cédez plus aux achats impulsifs que vous abandonnez dans un coin du jardin, faute de place idéale. Informez-vous. S’il est toujours sage et judicieux de suivre l’adage, « la bonne plante au bon endroit », il faut dorénavant aussi se poser la question de son adaptation aux conditions difficiles. Surtout pour les végétaux, notamment les arbres, qui ont une longue vie. Faites confiance aux pépiniéristes spécialisés, les premiers à éprouver la résistance naturelle des végétaux à la chaleur et la sécheresse, les premiers à proposer une nouvelle palette végétale. Testez de nouvelles essences qui ont déjà fait leurs preuves dans des climats plus chauds en se débrouillant sans assistance. Les sophora, Styphnolobium japonicum, savonnier, Koelreuteria paniculata, originaires du Japon ou le févier Gleditsia triacanthos natif d’Amérique, ont partie de la liste.


Parmi les vivaces, laissez-vous tenter par les grandes classiques des sols drainés, beaucoup moins délicates qu’avant : le Gaura lindheimeri aux petites fleurs blanches et roses ou l’aérienne verveine de Buenos Aires, Verbena bonariensis qui se ressème à l’envi. Toutes deux, des championnes de longue floraison. Pourquoi ne pas essayer quelques espèces méditerranéennes ? Avec un grand sens de l’esthétique, Olivier Filippi, pépiniériste dans l’Hérault et Beth Chatto dans l’Essex, tous deux pionniers des jardins secs, les ont déjà utilisées ailleurs.


Tenir l’eau … à l’œil


L’eau c’est la vie. Celle de la faune et de la flore. L’eau de pluie vaut de l’or. Tombée du ciel, elle mérite d’être stockée dans une citerne, un bac, un bassin, un fossé, plutôt que de finir à l’égout. Par les temps qui courent, la gérer tout en évitant les gaspillages n’est pas un casse-tête mais un vrai challenge. Inutile d’arroser tout le jardin sans discernement. A part les nouvelles plantations, les jardinières et les légumes du potager, les autres doivent, seules, se tirer d’affaire. C’est, qu’on le veuille ou non, le b. a.- ba de demain.


S’il faut vraiment arroser, ne le faites pas superficiellement. Les racines restent en surface, ne se développent pas en profondeur et sont donc plus sensibles à la sécheresse. Préférez un arrosage abondant à intervalles espacés qui force les racines à s’enfoncer. A quel moment ? En fin d’après-midi ou dès potron-minet lors des périodes très chaudes, pour réduire les pertes par évaporation. Attention aux sols légers, ils doivent être arrosés plus souvent car ils ne retiennent pas l’eau. L’économiser, c’est aussi d’autres gestes, comme pailler le sol pour qu’il garde l’humidité et le biner pour l’aérer et optimiser la moindre goutte. De l’avis unanime, un paillage ou un binage vaudrait d’ailleurs plus d’un arrosage.

Ciel mon gazon


Gazon à l’anglaise, green de golf, terrain de foot, coin d’herbe pour les enfants ou pré fleuri, c’est selon. Toujours est-il qu’après une vague de chaleur, lorsque la pelouse vire au paillasson, le moral est à zéro. Les besoins en eau d’une pelouse sont importants. Si vous l’installez, choisissez des variétés de pelouse à enracinement plus profond et des graminées qui s’accommodent de la sécheresse et des conditions difficiles, telle la fétuque ovine ou la fétuque élevée. Tondez moins pour augmenter la résistance de l’herbe. En effet, la santé d’une pelouse résulte en grande partie de la fréquence des tontes et de la façon de couper l’herbe. En règle générale, évitez de couper trop ras, le gazon s’affaiblit et risque de jaunir. Les mousses et mauvaises herbes s’installent plus facilement. Lorsqu’il fait très chaud, tondez un cran plus haut. Si un apport d’engrais ou de compost « maison » est nécessaire, boostez en début de printemps et testez certains amendements organiques à base de microparticules de charbon à haute capacité de rétention d’eau. Cela dit, une autre solution plus raisonnée est la tonte différenciée qui laisse des zones naturelles moins ou non tondues. Les herbes hautes attirent les pollinisateurs et retiennent l’humidité. Plus radicale encore, celle des moutons friendly ! Ils se nourrissent et en échange ils apportent de la fumure naturelle. De quoi rêver, non ?



Réinventez le potager

Tout un programme à prévoir dès maintenant. En commençant par changer les variétés et espèces habituelles pour choisir des plus robustes. En échelonnant dans le temps les semis et repiquages, en privilégiant les cultures de mi-saison et en misant sur l’automne globalement plus chaud et donc plus propice aux plantations. Pourquoi ne pas composer avec l’hiver … toutes des opportunités inédites et des défis favorisés par l’augmentation des températures minimales.