Beaucoup de végétaux, arbres, arbustes, herbes et vivaces, – environ 15000 espèces – appartiennent à la famille des légumineuses, aussi appelée fabacées. Sans entrer dans les arcanes de la botanique, il est utile de retenir que c’est une famille très étendue présente à la fois dans les zones froides et les tropicales. Sur presque l’ensemble de la planète. En tous cas, une des plus grandes familles de plantes à fleurs. Elle représente environ un douzième de toutes les plantes à fleurs connues et fournit le nombre le plus important d’espèces utiles à l’homme, qu’elles soient alimentaires, industrielles ou médicinales.
Ceci dit, nous viennent directement à l’esprit, sans beaucoup réfléchir, les lupins et pois de senteur, les haricots et l’un ou l’autre engrais verts comme la vesce qui régénère les sols. Au rayon des arbustes, le genêt qui inonde le printemps de ses fleurs jaunes. Quant aux arbres, l’exercice est plus difficile. En cherchant un peu on s’arrête au robinier faux acacia, au Gleditsia qui lui ressemble, au cytise faux-ébénier ou Laburnum et enfin au Sophora. Sans oublier les plus rares Gymnocladus dioica, le chicot du canada, le virgilier jaune ou Cladrastis lutea, le Maackia amurensis et l’arbre de Judée, Cercis siliquastrum. Pour les endroits plus abrités et les jardiniers du sud, on ajoute à la liste l’Acacia dont l’A. dealbata dit mimosa, l’Albizia julibrissim dit l’arbre à soie ou encore le genêt de l’Etna, Genista aetnensis.
Tunnel de Laburnum à Boughton Grange Albizia julibrissim ‘Ernest Wilson’
Sur le plan botanique, on distingue 3 sous-familles. Les Papilionacées aux fleurs irrégulières, – à deux ailes -, qui ressemblent à un papillon, comme c’est le cas chez le Sophora. Puis viennent les Césalpiniacées aux fleurs pseudo-papilionacées comme chez le Gleditsia et enfin les Mimosacées aux fleurs régulières comme chez l’Acacia. Globalement, on reconnait les plantes de la famille des légumineuses à leurs feuilles généralement composées, – sauf chez le Cercis siliquastrum – et à leurs fruits en forme de gousses caractéristiques appelés scientifiquement légumes. Et pour peaufiner le portrait, on pourrait ajouter que leur qualité première est un appétit assez frugal, une étonnante résistance à la sécheresse et une bonne volonté à s’adapter aux sols pauvres due vraisemblablement à leur faculté de fabriquer leur nourriture azotée. En d’autres mots, les légumineuses ont le pouvoir de fixer l’azote atmosphérique de l’air avec l’aide de bactéries associées aux racines. Le principal inconvénient de la troupe étant leur frilosité et notamment chez les Mimosacées, un manque de rusticité certain.
Cercis siliquastrum Acacia dealbata
Quelques ligneux propices aux plantations d’hiver retiennent notre attention.
SOPHORA
Le genre Sophora appartenant à la sous-famille des Papilionacées, compte plus d’une vingtaine d’espèces issues d’Amérique, d’Australie et d’Asie. Le plus planté et le plus connu de la bande est incontestablement le sophora du Japon, Sophora japonica appelé aujourd’hui, suite aux subtilités botaniques, Styphnolobium japonicum. Oui, vous avez bien lu !Pas évident à retenir, à écrire et à dire. C’est la raison pour laquelle la plupart des pépiniéristes et des amateurs font fi de la science pour ne retenir que l’ancien nom. Même dans la bible anglaise, le fameux RHS Plant Finder, 2012-2013.
S. japonicum ‘Regent’© A. Wespelaar
Originaire contrairement à ce que son nom l’indique de Chine et de Corée, il est très présent au Japon où on le surnomme l’arbre des pagodes. On le repère en effet près des temples bouddhistes. Chez nous, aussi très à la mode et souvent planté après guerre comme arbre de position dans les jardins et les parcs mais également dans les bois et les futaies. A Kew, un vénérable sujet aurait déjà été introduit en 1760. Il fait partie des vétérans, les Kew’s ‘Old Lions’. Son feuillage élégant et décoratif finement découpé et sa cime étalée et arrondie attirent les regards.
Carte d’identité
Il affectionne les sols frais et profonds, – son enracinement est profond lui aussi – telles les terres argilo limoneuses mais tolère les terrains secs et légers. Sa résistance au calcaire divise les spécialistes. A première vue il ne semble pas lui déplaire.
La floraison, effective sur les arbres adultes, vient tardivement à une époque assez creuse, vers la fin de l’été. Plus précisément en août-septembre. Elle est parfois plus précoce après un été chaud. En revanche après un été frais, il refuse carrément de fleurir. Les grosses inflorescences blanches voire jaunâtres, papilionacées et parfumées se déploient en longs panicules de 30 cm.
S. japonicum ‘Regent’ © A. Wespelaar
Trop imposant pour la plupart des jardins, parfois plus de 20m, optez alors pour sa forme ‘Pendulum’, d’une ampleur raisonnable d’environ 8m de haut et greffé au dessus d’une tige de 1,80 à 2,40 m. Ses branches retombent à la verticale jusqu’au sol et forment une véritable tonnelle naturelle qui s’élargit au fil des ans. Les branches sont sculpturales et contournées. L’effet est impressionnant. Certains sujets plus tordus et plus compacts que d’autres nécessitent une taille régulière pour donner de la lumière aux branches plus anciennes. Un bémol au joli tableau, cette variété ne fleurit pas.
© A. Wespelaar © A. Wespelaar
S. davidii synonyme de S. viciifolia est en réalité un arbuste touffu de 2m de haut à branches arquées et feuilles caduques. Ses inflorescences de petites fleurs bleu pourpré et blanches ressemblent à des pois de senteur. S. tetraptera originaire de Nouvelle Zélande et du Chili est à planter en climat doux. Ses fruits exhibent une teinte jaune très décorative en fin d’été.
S. davidii
GLEDITSIA
Nommé en l’honneur du botaniste allemand J. Gottlieb Gleditsch, spécialiste de la sexualité et du mode de fécondation des plantes, le Gleditsia appelé aussi févier, de la famille des Césalpiniacées est originaire du centre et de l’est de l’Asie, d’Afrique tropicale et d’Amérique. Gleditsia triacanthos, l’américain est le plus planté. On apprécie leur allure élancée, délicate et légère. Nettement moins leurs curieuses épines simples ou ramifiées sur le tronc. Les aiguillons acérés de G. caspica peuvent même dépasser 15 cm de long, tout comme ceux de G. japonica et ceux de G. macracantha. Heureusement, ces derniers sont plantés ici quasi exclusivement dans les jardins botaniques et arboreta ! Dans nos jardins, la plupart des variétés de féviers en sont dépourvus. Merci les pépiniéristes et hybrideurs.
G. triacanthos ‘Sunburst’ © A. Wespelaar
G. sinensis © A. Wespelaar
Carte d’identité
Les feuilles composées donnent une ombre légère plus ou moins dense selon les variétés. La feuillaison est tardive vers mi mai et à l’automne les feuilles caduques séchant très vite, se décomposent rapidement, foliole par foliole, avant de s’envoler au gré du vent. Leur coloration à cette époque n’est franchement pas leur qualité première.
La floraison de début d’été n’est pas spectaculaire. Seulement des petites fleurs modestes et odorantes formant des grappes insignifiantes mais très attractives pour les insectes dont les syrphes et les chrysopes. Quant aux fruits, peu fréquents sous notre climat, ils apparaissent après les étés ensoleillés en grandes gousses brun-noir torsadées de 20 à 40 cm de long. Quelques variétés comme G. triacanthos ‘Sunburst’ ne fructifient pas.
G. triacanthos ‘Sunburst’ au Bois de Morville
Le Gleditsia, comme la plupart des légumineuses, n’est pas exigeant. Il a juste besoin d’un peu de soleil. A l’aise dans n’importe quel sol suffisamment drainé. Avec une légère préférence pour les sols argilo limoneux et sans rechigner dans les sols secs à tendance calcaire. Gare aux terres gorgées d’humidité. Le pire pour lui. Les mauvaises terres, les conditions extrêmes et les zones polluées ne lui font pas peur. L’enracinement étant assez profond, il n’y a pas de véritable concurrence avec la végétation installée à ses pieds. Parfaitement rustique, il se développe dans la plupart des climats. Les premières années, il est cependant utile d’accorder une attention particulière aux jeunes plants qui peuvent souffrir du gel. Attention aussi aux vents dominants, ils cassent les branches. Ceci dit, le Gleditsia supporte la taille sans broncher. Il ne faut pas hésiter à couper les pointes des longues pousses de l’année pour l’aider à se ramifier.
Dans les jardins, les variétés horticoles de G. triacanthos, le févier d’Amérique sont à l’honneur. Moins vigoureuses et plus compactes que le type (qui s’élève parfois jusqu’à 30 m) et dépourvues d’épines, elles y sont parfaitement adaptées. Elles proviennent pratiquement toutes de G. triacanthos f. inermis ; vous l’aurez compris, sans épines. La plus répandue, G. triacanthos ‘Sunburst’ est un petit arbre (environ 10m) à port étalé, pyramidal, à l’allure aérée et peu dense. Il ressemble en plus raffiné au Robinia pseudoacacia ‘Frisia’. Parfaitement doré au printemps et à l’automne. Entre les deux saisons, d’un vert tilleul assez frais. G. triacanthos ‘Rubylace’ a un intéressant feuillage bronze, voire brun pourpre et une allure ultra légère voire clairsemée. On le rencontre de plus en plus dans les jardins. G.t. ‘Elegantissima’ a une couronne bien ronde et ne dépasse pas 4 à 5m. G.t. ‘Bujotii’ est la forme pleureuse alors qu’en revanche ‘Skyline’ possède un port érigé bien adapté aux alignements.
G. triacanthos ‘Rubylace’ G. t. ‘Elegantissima’
QUELQUES ARBRES MOINS CÉLÈBRES
CLADRASTIS
Moins connu et moins planté, le virgilier appelé Cladrastis kentukea d’origine américaine, est malheureusement réservé aux collectionneurs. A tout le moins aux connaisseurs. Et paraît-il en voie de disparition. Dommage, il est pourtant réputé pour ses jolies fleurs blanches odorantes papilionacées et pendantes au look de glycine qui apparaissent sur les sujets âgés. Dès le mois de juin, un régal pour les abeilles. Il faut savoir que la floraison est plus généreuse dans les pays aux étés longs et chauds. Un remarquable spécimen est à admirer dans le Jardin botanique de Düsseldorf blotti dans un endroit abrité et très ensoleillé. Le port du virgilier est léger, sa cime arrondie, étalée et irrégulière. Il ressemble généralement à un gros arbuste à plusieurs troncs souvent penché car son enracinement n’est pas très profond. En automne, les feuilles se colorent d’or. Cette fois, un régal pour le jardinier.
Cladastris kentukea ‘Perkins Pink’ © Arboretum Wespelaar
On l’appelle aussi Cladrastis lutea, yelllow wood, virgilier jaune car son bois produit une teinture jaune. C. kentukea ‘Rosea’ et ‘Perkins Pink’ exhibent des fleurs roses qui laissent un souvenir inoubliable à ceux qui ont la chance de les avoir aperçues. Cladrastis sinensis le cousin asiatique est rarissime. A protéger des hivers rigoureux.
C. kentukea C. kentukea C. kentukea
MAACKIA
Une autre papilionacée, le Maackia et plus précisément Maackia amurensis. Il est dédié au naturaliste russe Richard Maack qui le découvrit sur les rives du fleuve Amour en Sibérie. Un petit arbre tout-à-fait rustique, cousin du Cladrastis, poussant dans les forêts de l’est asiatique. Certains l’appellent encore Cladrastis amurensis. A première vue pas vraiment spectaculaire. Pourtant Jelena de Belder a toujours pris sa défense et mieux en a fait maintes fois la promotion. Elle le conseillait dans n’importe quel jardin. Certainement pour son caractère mellifère. Les épis de fleurs blanches denses, dressés et raides apparaissent en plein été directement suivis par des gousses allongées de 3 à 6 cm. Sans doute aussi pour son côté peu poussant et sa forme étalée, en ombelle sur un tronc court. Et vraisemblablement encore pour ses grandes feuilles pennées de 20 à 30 cm de long faciles à repérer surtout à l’automne lorsqu’elles exhibent un ton jaune beurre. Bref, le Maackia n’est absolument pas à considérer comme une simple « bio » plante ! C’est-à-dire dans le jargon des dendrologues, une plante « botanical interest only » !
© Arboretum Wespelaar
© A. Wespelaar © A. Wespelaar © A. Wespelaar
GYMNOCLADUS
Pourquoi diable surnommer Gymnocladus dioica, chicot du Canada ? Pas vraiment élégant comme surnom. En réalité en hiver lorsque les feuilles sont tombées, les esprits chagrins lui trouvent une silhouette grêle d’arbre mort. Et comme les feuilles débourrent assez tard au printemps… G. dioica, de la famille des Césalpiniacées, est pourtant planté dans les parcs et grands jardins. Il le doit à son long feuillage composé XXL qui peut mesurer jusqu’à 1m de long pour 50 cm de large. Géant. Débourrant rose au printemps, virant au vert foncé avant de se colorer franchement de jaune à l’automne. Un look exotique et curieux. En juin, des panicules de petites fleurs étoilées, blanches assez discrètes sont suivies de gousses pendantes. Mais à la condition que le soleil et la chaleur de l’été soient généreux. Exigeant un sol profond, fertile et bien drainé, il croit lentement chez nous mais peut atteindre à l’âge adulte plus de 15m. Aux USA on l’appelle «Kentucky coffee tree ». Il paraît que ses graines étaient torréfiées par les premiers colons américains en période de disette lorsqu’il n’y avait pas de vrai café à se mettre sous la dent.
© A. Wespelaar
© A. Wespelaar
Légume
Le mot « légumineuse » renvoie bien évidemment au mot légume. Ici pour les arbres il s’agit en réalité des gousses qui constituent non pas des fruits mais botaniquement parlant des légumes.
Autodéfense
Beaucoup de légumineuses contiennent des substances qui auraient le pouvoir d’éloigner les insectes.
Merci !
Nous tenons à remercier Koen Camelbeke et son équipe de l’Arboretum Wespelaar de nous avoir proposé des photos pouvant illustrer notre article.