Photos de Koen Camelbeke, Benoit Choteau et Marie-Noëlle Cruysmans
Les Hamamélidacées compte une vingtaine de genres et plus de 80 espèces. Des plantes à feuilles persistantes ou caduques des régions tempérées à tropicales, notamment l’est de l’Asie et l’Amérique du Nord. Les seigneurs de la tribu sont l’Hamamelis à l’étonnante floraison hivernale et des arbres majestueux comme le Liquidambar ou le Parrotia. Quelques cousins arbustifs parfois trop confidentiels tels les Corylopsis, Disanthus, Fothergilla, Parrotiopsis ou x Sycoparrotia devraient être plus plantés dans les jardins. Koen Camelbeke, directeur de l’Arboretum Wespelaar et quelques pépiniéristes spécialisés les mettent à l’honneur et nous font part de leur expérience et de leur savoir-faire dans la culture de ces différents végétaux.
Corylopsis


Originaire des forêts et zones montagneuses chinoises, japonaises, coréennes et himalayennes, le genre Corylopsis est composé d’une vingtaine d’espèces dont quelques-unes supportent notre climat. On les aime pour leur floraison de mars quand les Hamamelis ont fini la leur et quand dans les jardins, hormis les petites étoiles du Cornus mas ou du forsythia, il y a trop peu de fleurs à admirer. Avant l’apparition du feuillage, sur les rameaux nus, apparait une myriade d’élégantes petites grappes de fleurs, jaune pâle, comme des clochettes délicatement parfumées, de quoi attirer les insectes pollinisateurs. Impossible de les confondre avec celles du Forsythia, d’un jaune criard voire tapageur. Après la chute des pétales, des bractées vert-pâle restent suspendues avant l’arrivée des fruits, des petites capsules ligneuses. Les feuilles simples, ovales et caduques ressemblent, en plus plissé, à celles d‘un noisetier, Corylus avellana, d’où leur surnom de noisetiers du Japon. A l’automne, elles prennent des teintes jaunes plus ou moins cuivrées.


Le Corylopsis prospère sans souci à mi-ombre, en sous-bois, dans un sol frais, à tendance acide, riche en humus et bien drainé. Avec une silhouette dense, une cime arrondie large et étalée, presqu’à l’horizontale, il a besoin de place pour que ses rameaux finement ramifiés et arqués, puissent élégamment retomber. Le must est de l’installer à l’avant-plan de végétaux à feuillage persistant. Jamais malade, il est rustique à condition d’être à l’abri du vent et des gelées tardives nocturnes qui pourraient abîmer ses boutons floraux. La meilleure façon de le protéger est de le placer à l’abri d’un mur ou à l’abri d’autres végétaux. Pour Benoit Choteau, il est indispensable de jouer avec la météo. Dès qu’il y a un risque de gelée, la pose d’un voile de protection est non négociable. Quant à l’été poursuit-il, gare au stress hydrique, au soleil brûlant et aux grandes sécheresses ; le Corylopsis déteste avoir soif.
Les différentes espèces se ressemblent et sont parfois difficiles à distinguer.




- C. pauciflora est le plus courant et le plus précoce. Il pousse au Japon, également en Corée et à Taiwan. Assez compact, de croissance lente, – 1,5 m de haut pour 3 m de large -, ses grappes de fleurs sont nombreuses mais petites, d’où son nom de pauciflora, qui signifie peu de fleurs.
- C. spicata, également japonais, a un port plus dressé, – 2 m x 2 m -, plus raide, à l’image d’un noisetier. Ses branches tortueuses sont égayées en avril de grappes de fleurs parfumées plus grandes que celles de C. pauciflora, d’une teinte vert jaune avec des anthères pourpre foncé. C. s. ‘Red Eye’ exhibe des fleurs légèrement marquées de rouge avec des étamines bien rouges.
- C. sinensis, originaire du Tibet et du Sichuan, donne en avril, de grandes grappes parfumées d’un beau jaune citron, avec des anthères plus foncées et des bractées brunes. Ses jeunes feuilles débourrent avec des nuances de bronze pourpre et son port reste très érigé, environ 4 ou 5 m de haut et de large. Bien parfumé, c’est un des coups de cœur de Damien Devos. C. s. var. calvescens aux fleurs plus pâles et aux inflorescences plus petites a reçu 2 étoiles à l’Arboretum Wespelaar, comme « plant of very special intrest ». C. s. var. sinensis ‘Spring Purple’ offre des jeunes tiges pourpres et des jeunes feuilles rosées, voire rouge violacé.
- C. glabrescens, issu de Corée et du Japon, est un grand format de 5 m de haut et de large qui offre en avril des fleurs jaunes aux anthères pourpres. Il existe une variante, C. g. var. gotoana, quilui ressemble. La variété ‘Chollipo’ découverte en Corée du sud dans l’arboretum du même nom, présente quant à elle des jeunes feuilles bronze.
Disanthus


Originaire des forêts montagneuses et des bois humides du Japon, D. cercidifolius, la seule espèce du genre, a un feuillage magnifique en forme de cœur, rappelant celui du Cercis, l’arbre de Judée. Pour Koen Camelbeke et Dominique De Witte, il figure à l’automne parmi le top 10 des arbustes à belle coloration. A Wespelaar, il a obtenu 2 étoiles. Ses feuilles, vert cuivré au printemps, virent au jaune orangé, au violet pourpre en passant par le rose, le rouge ou le noir. Un spectacle surprenant qui peut, en de bonnes conditions, durer presqu’un mois. La floraison de novembre est plutôt discrète. Elle fait penser à celle de l’hamamélis : des petits pétales chiffonnés, rougeâtres, à l’odeur peu agréable, accrochés directement sur les branches.

Avec une envergure d’environ 3 m de haut à l’âge adulte, il pousse à mi-ombre, sous des hauts arbres, dans un sol acide, bien drainé, humifère, conservant une certaine humidité en été. On le dit difficile à démarrer, mais une fois installé, le spectacle est au rendez-vous. Le cultivar‘Ena-nishiki’, moins grand, exhibe un feuillage largement marginé de blanc crème et débourre curieusement rose au printemps avant de devenir pourpre à l’automne.




Fothergilla




Du nom d’un médecin anglais, John Fothergill, collectionneur et passionné de plantes, le Fothergilla nord-américain, doit sa réputation à des couleurs d’automne magiques autant qu’exceptionnelles, aux mille nuances, variant entre l’orangé et le cramoisi. En avril, avant l’apparition des feuilles, éclosent des fleurs parfumées, blanches, aux nombreuses étamines jaunes, groupées en petits épis cylindriques … comme des goupillons pris d’assaut par les insectes. C’est un coup de cœur de Benoît Choteau, Damien Devos et Bruno Bonnivers. A l’aise au bord des marécages et tourbières, il demande comme ses cousins, un peu d’ombre ou le soleil de l’après-midi, un sol à tendance acide, de l’humus, de l’humidité et une exposition abritée. Il a la réputation d’être un peu drageonnant mais vraiment pas trop. Quelques espèces et cultivars sont à épingler :



- F. major, le plus connu,figure parmi les plus grands, environ 2 m de haut.
- F. gardenii est plus compact, environ 1m de haut. F. g. ‘Blue Mist’ a un petit feuillage bleuté surprenant.
- F. x intermedia ‘Blue Shadow’ exhibe lui aussi, un feuillage printanier bleu argenté. Les avis des spécialistes divergent quant aux qualités de ces 2 derniers. Les uns préfèrent le port plus compact de ‘Blue Mist’, les autres, plutôt la note argentée du deuxième. A Wespelaar,’Blue Shadow’ a reçu 2 étoiles. Cela dit, les couleurs d’automne des variétés au feuillage bleu sont moins extraordinaires.
- F. x intermedia ‘Mount Airy’ paraît être une variété prometteuse à Wespelaar.
Parrotiopsis


Parrotiopsis jacquemontiana, est apparenté, comme son nom l’indique au Parrotia, même si en réalité, il est très différent. Sa silhouette est plus petite, – un arbuste large de 4 à 5 m de haut sur 3 m de large -, son port est dressé et ses feuilles jaunes à l’automne ne virent pas au feu d’artifice. Originaire des sous-bois de l’Himalaya et d’Afghanistan, il apprécie les sols acides profonds, la mi-ombre ou le soleil à l’excepté de celui du midi. D’avril à juin, et parfois de manière intermittente pendant l’été, apparaissent des petites fleurs jaunes entourées de grandes bractées blanches. Généralement, il enchante ceux qui, un jour, ont eu le plaisir de le rencontrer en fleurs.


X Sycoparrotia
x Sycoparrotia semidecidua, hybride entre les genres Sycopsis et Parrotia, est un grand arbuste de 3 à 5 m de haut, au port étalé, dont les rameaux sont presqu’à l’horizontale. Obtenu en Suisse dans les années 50, il pousse dans le même habitat que le Parrotia mais présente des feuilles semi- persistantes à persistantes comme le Sycopsis, surtout lors des hivers doux. En mars, éclosent des grappes denses de fleurs rouges alors qu’à l’automne, le feuillage vire au jaune. Tolérant jusqu’à moins 12°C, le cultivar ‘Purple Haze’ est une valeur sûre pour Jean-Loup Hennebelle. Il dépasse de loin l’intérêt de l’espèce, avec un feuillage pourpré au débourrement, puis vert foncé en été avant de virer à la fois rouge bordeaux, jaune doré ou orange vif à l’automne. Pour Koen Camelbeke, le fait de garder longtemps son feuillage est une qualité supplémentaire. Pour le cultivar ‘Autunno Rosso’, il faut ajouter une note de doré à la palette automnale.



Coin du collectionneur
Quelques arbustes plus délicats ou plus frileux font la fierté et la satisfaction de certains jardiniers avertis.
- Sycopsis

Sycopsis sinensis, originaire des montagnes de Chine et de l’Himalaya, est la seule espèce cultivée. Arbuste dressé de 4 m de haut, avec un feuillage semi-persistant, il produit en février-mars, des petites grappes de fleurs jaunes. Il exige une plantation en sol frais, acide, à l’ombre ou au soleil. La clé de la réussite est de lui trouver une place à l’abri des vents froids, par exemple entre des grands arbres.

- Loropetalum

L. chinense est un arbuste d’1,50 à 2 m de haut poussant dans les collines et les bois de Chine, Japon ou Himalaya. Ses petites feuilles persistantes parfois teintées de rouge ou d’orangé s’alignent sur des rameaux en cascade. En mars, des fleurs parfumées, blanches, roses ou rouges, en lanières, naissent au beau milieu du feuillage. Elles font penser à celles de l’Hamamelis. Son grand défaut ? Le manque de rusticité. A Wespelaar, malgré plusieurs essais, il n’a pas survécu. La solution est sans doute de le cultiver en pot, pour être mis à l’abri l’hiver. Méfiez-vous donc des L. chinense ‘Fire Dance’ au feuillage pourpré et à la floraison rose fuchsia qui attirent souvent les amateurs dans les grandes jardineries.
- Distylium



Originaire de Chine, de Corée, du Japon et d’Amérique centrale, Dystilium racemosum n’est que moyennement rustique chez nous. A feuilles persistantes, à la floraison printanière rouge vif, il pousse dans un sol acide et drainé, à mi-ombre et à l’abri des vents froids. L’hybride Distylium x ‘Blue cascade’ aux jeunes feuilles allongées vert bronze devenant bleutées résiste à -15° et s’accommode de la chaleur et de la sécheresse. A Wespelaar, plusieurs spécimens plantés il y a près de 25 ans restent très attrayants.
- Fortunearia et Sinowilsonia
Fortunearia sinensis et Sinowilsonia henryi, provenant tous deux de Chine, sont vraiment ce qu’on appelle dans le jargon, des plantes « BIO », « botanical interest only », en d’autres mots pour les jardins botaniques et les collectionneurs. A l’Arboretum Wespelaar, on les expérimente, notamment à partir de graines récoltées dans la nature.


Merci !
Merci à Koen Camelbeke et Benoit Choteau pour leurs magnifiques photos et merci à tous ceux qui sont intervenus dans cet article pour leurs compétences et leurs précieux enseignements !
- Arboretum Wespelaar, Koen Camelbeke, www.arboretumwespelaar.be
- Pépinières Choteau, Benoît Choteau, www.pepinieres-choteau.com
- Pépinière Damien Devos, www.damiendevos.be
- Pépinière du Vent Val & Bonnivers, Bruno Bonnivers, Isabelle Chauvier et Etienne Dardenne, www.pepiniereduventval.be
- Pépinière Le Try, Dominique De Witte, www.letry.be
- Pépinière Hennebelle, Jean-Loup Hennebelle, www.hennebelle.com