Les graminées, pourquoi faire ?

On les aperçoit dans tous les jardins. Au soleil, à l’ombre, dans les sols secs ou humides. Comment les mettre en scène ?
Stipa gigantea et vivaces estivales
Aux jardins fruitiers de Laquenexy

Oui, elles sont omniprésentes. Même dans les inévitables ronds-points à l’entrée des villes. On dit d’elles qu’elles sont des herbes décoratives ou ornementales, sans doute pour les différencier de l’herbe commune des gazons et des prés. Et certainement des herbes dites mauvaises. Venues non pas comme d’habitude d’outre-Manche mais cette fois d’outre-Rhin, elles ont un vrai rôle à jouer. De toutes les tailles, elles forment des haies, séparations, bordures ou massifs, rehaussent les parterres, camouflent les angles disgracieux, couvrent le sol, animent les graviers et les jardinières sur la terrasse.

Au château de Valençay

Elles structurent le jardin à leur manière, plus discrète, moins rigide que les traditionnels arbres et arbustes. Graphiques, elles apportent hauteur et volume, légèreté et mouvement. Robustes, elles n’exigent rien de spécial comme entretien, à part quelques coups de peigne et généralement une taille en début de printemps. Elles offrent un spectacle de longue durée, pas moins de 8 mois par an. L’hiver y compris, lorsque le givre les magnifie. Dans tous les cas de figure, vous l’avez compris, elles sont indispensables. Le tout est de bien les choisir.

Calamagrostis acutiflora ‘Karl Forster’ au jardin de Merzig
Derrière le bassin du Jardin Plume les carrés de graminées

Dans les massifs

Dans les plates-bandes, excellents faire-valoir des autres plantes, les graminées tempèrent les couleurs, allègent les compositions et donnent du naturel aux scènes les plus sophistiquées. Elles jouent les contrastes et lorsqu’elles sont répétées, elles rythment l’ensemble. Plusieurs jardins célèbres comme le Jardin Plume en Normandie, celui d’Hermannshof en Allemagne ou de Piet Oudolf aux Pays-Bas les mettent admirablement en scène. Les associations y sont toujours réussies avec des plantes vivaces sculpturales rappelant les prairies nord-américaines, asters, – botaniquement Symphyotricum -, Veronicastrum, Sanguisorba, Persicaria, Helianthus… Idéales aussi avec les Thalictrum, valérianes, eupatoires, euphorbes, verveines de Buenos aires, achillées, sauges, anémones du Japon… les exemples sont très nombreux.

En vagues ondulantes

Pennisetum alopecuroides

La tendance est de les planter en masse pour donner un effet naturel cher aux architectes paysagistes contemporains. Un style de prairie où une seule espèce est installée en grandes quantités. Cela rend l’espace plus imposant. Plus grandiose. Des moutonnements de Pennisetum alopecuroides, aux petits goupillons, des brouillards de Deschampsia cespitosa pour sols humides et ombragés, des fontaines soyeuses de Sporobolus heterolepis pour sols secs et chauds… Sans oublier les nuées de Calamagrostis acutiflora ‘Karl Foerster’, des sentinelles parfaitement dressées à nulle autre pareilles. L’astuce pour éviter l’impression de fouillis est de les planter en les espaçant, sans les serrer les unes contre les autres. Au printemps, les touffes sont coupées au taille-haie, les chaumes broyés sur place avec la tondeuse et directement remis en place comme paillis. Après quelques années, elles sont divisées à l’aide d’une bêche bien affutée, après avoir sorti la motte de terre.

En haies et bordures

Pour innover et changer l’habitude des alignements de troènes, cyprès, ifs ou des grillages vêtus de lierre, essayez à la place, les graminées hautes, denses, opaques, à l’encombrement limité. Les eulalies ou Miscanthus à la silhouette altière sont les champions du genre et même s’ils ne sont pas persistants, ils poussent vite, gardent une belle tenue sans tuteurs, tout en résistant aux vents et intempéries. On les taille au coupe-haie au début du printemps juste au-dessus des jeunes pousses. Rien de plus simple.

Pour marquer le détour d’une allée, souligner les bords d’un chemin ou d’un massif, remplacer les buis dévastés par la pyrale ou la maladie, pour adoucir les parterres trop stricts, quelques graminées moins hautes relèvent le défi. Hakonechloa macra par exemple, installé en sol frais, n’en finit pas d’onduler ou Stipa tenuifolia, l’herbe aux cheveux d’ange, une vedette incontestée des sols légers. Ses inflorescences plumeuses ont attrayantes de juillet à décembre et son feuillage persistant, le reste du temps.

Pour marquer un coin…

Sur les talus, en couvre-sol, dans les graviers

Hakonechloa macra

Au pied d’un arbre, sur les talus ou dans les graviers, pourquoi pas, à condition de choisir la bonne plante au bon endroit. Pour les graviers, coins secs et ensoleillés, l’Imperata ‘Red Baron’ aux couleurs de feu, l’Helichtotrichon sempervirens, bleu métallique, le Stipa gigantea à la grâce aérienne inégalée sont au rendez-vous. Le truc qui change tout, est d’installer une bâche horticole sur le sol, laissant passer l’air et l’eau mais pas les indésirables, puis la fendre pour y planter les ornementales. Le gravier qui garde l’humidité et réfléchit la lumière, sera versé tout autour dans un volume équivalent à la surface de la plante. Sur les talus, optez pour une multitude de Pennisetum alopecuroides, et autour d’un arbre ou comme couvre-sol, pourquoi pas des Carex ou des Hakonechloa qui apprécient la mi-ombre.

En pot

Sur les terrasses, le jeu des graminées vaut la chandelle. Pour ajouter un zeste de naturel et surtout composer des scènes autrement plus dynamiques et graphiques que celles des classiques géraniums des balcons. L’idéal est de choisir des espèces décoratives qui n’exigent pas trop d’eau. L’Hakonechloa macra au port souple, – à nouveau lui-, mais aussi le Stipa tenuifolia pour sa légèreté ou le Festuca glauca, petite boule bien serrée au feuillage bleuté. Il faut absolument éviter l’eulalie ou Miscanthus qui demande trop d’eau. Avec une bonne couche drainante au fond du pot, un feutre horticole qui le sépare des racines, le tour est joué. On pourra aisément sortir la plante du pot, tous les 2 ou 3 ans pour la diviser, retailler les racines et remettre du terreau neuf en surface.

 Décidément, elle est loin l’époque où on ne pouvait se mettre que quelques herbes de la Pampa sous la dent.

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