Oubliés, les légumes ?

Certains légumes ont la cote. Ils reviennent à la mode et c’est tant mieux. Délicieux et graphiques, en cette saison, ils sont à l’honneur. Du beau et du bon au jardin potager !

Arroche ou tétragone, de la famille de l’épinard, chou rave, bette, cardon et panais sont au goût du jour. Ils ont fait les beaux jours des potagers des XVIIIe et XIXe, puis ont été rayés de la carte dans les années 70 et 80 surfant sur la vague de l’agriculture industrielle au profit de variétés standardisées et calibrées proposées par les grandes entreprises semencières. Aujourd’hui, nul besoin d’être végétarien pour les réhabiliter. Ils en valent vraiment la peine

Chou-rave

Les choux forment une belle et grande famille. Choux-fleurs, cabus, rouges, de Milan et de Bruxelles se taillent la part du lion. Et pourtant, il y en a des tas d’autres comme le petit chou-rave au look bizarre semblant tomber tout droit d’une autre planète… ou d’un récit de science-fiction. Souvent confondu avec le chou navet alias le rutabaga, plusieurs en gardent un triste souvenir des temps de guerre et de disette. Bien qu’appelé rave, ce n’est pas sa racine que l’on déguste comme celle d’un radis, mais une boule blanche ou bleu-mauve, de la taille d’un poing, formée par un renflement de la tige. Sa culture est très ancienne. A maturité en un ou deux mois, ce légume tendre, doux et savoureux, autrefois roi du pot-au-feu, est aussi râpé tel quel comme une carotte ou cuit à la vapeur avec un pointe d’ail et de thym.

Tétragone et arroche

Appelée épinard d’été, la tétragone est originaire de Nouvelle-Zélande. Ses feuilles triangulaires, épaisses et charnues sont délicieuses. Elles se préparent de la même manière que l’épinard tout en offrant un peu plus d’onctuosité. Ne supportant pas le froid mais en revanche tolérant parfaitement la sécheresse, – ce qui n’est pas le cas de l’épinard qui a tendance à monter très vite en graines-, elle lui succède tout naturellement dès le mois de mai. Rampante, ses tiges ramifiées et étalées dépassent le mètre en tous sens. Cette année, elle a prouvé qu’elle avait bien sa place au potager.

L’arroche appelée communément, bonne dame ou chou d’amour, la plus ancienne des herbes à pot, a déserté nos jardins au siècle dernier. Venue d’Asie centrale, elle est sans doute un des premiers légumes consommés par nos ancêtres bien avant l’arrivée de l’épinard. Facile à cultiver, on la sème tout simplement en place. Son port érigé, de 1m à 1m50 de haut et son feuillage blond (vert clair) ou rouge foncé font penser à celui de la tétragone. En moins épais. Très décorative, elle trouve aussi une place de choix parmi les fleurs dans les massifs. Les feuilles tendres se mangent crues ou cuites. Moins acides que les feuilles d’oseille, elles les remplacent aisément dans les préparations culinaires.

Ficoïde et mertensia

La ficoïde appartient à la même famille que la tétragone. Sans doute plus anecdotique et plus difficile à dénicher et pourtant tellement délicate. On l’appelle glaciale ou cristalline car ses feuilles épaisses donnent l’impression d’être recouvertes de milliers de petits cristaux. On dirait des gouttelettes de rosée givrées. En fait, des minuscules vésicules translucides gorgées d’eau. Légèrement salée, agrémentant les salades et mescluns, la ficoïde a l’art de fondre dans la bouche. Avec une agréable sensation de fraicheur. Les jeunes feuilles des petites rosettes étalées sur le sol se récoltent au fur et à mesure jusqu’aux premières gelées. Une sensation nouvelle.

Dans un autre registre de saveur, la surprenante plante à huitre appelée aussi huitre végétale, pulmonaire de Virginie ou plus scientifiquement Mertensia maritima que nous avons découverte récemment. Le parfum iodé de sa feuille bleu vert renvoie immédiatement à celui du précieux mollusque. De quoi enchanter vos salades et vos plats de poisson. Décorative, rampante, elle se plaît en bord de mer dans les sols sableux et rocailleux et chez nous depuis deux ans, dans un grand pot en terre cuite.

Cardon et bettes

Le cardon, un des géants du potager, apparenté à l’artichaut, est dorénavant adopté dans les massifs de fleurs, tant son large feuillage argenté est spectaculaire. Graphiques, les feuilles découpées et épineuses forment une grosse touffe d’environ 1m50 de haut. En réalité, c’est la partie charnue des feuilles, les cardes, de redoutables pétioles munis d’épines qui sont comestibles. Le cardon apprécie une terre riche, du soleil et beaucoup de place pour pouvoir se déployer. Au début de l’automne, prêtez-lui un peu d’attention et de soins si vous comptez le manger. En effet, il est nécessaire de lier et entourer le feuillage d’un papier opaque (journal ou carton) pendant 2 à 3 semaines pour faire blanchir et s’attendrir les cardes. Après cette étape ultime, vous pourrez les déguster à la sauce blanche en accompagnement de gibier comme le veut la tradition. 

Les bettes ou blettes, – l’orthographe hésitant toujours, les deux termes sont utilisables -, malgré leurs côtes juteuses et leurs feuilles charnues, n’ont pas toujours l’espace qu’elles méritent. Tout comme d’ailleurs leurs cousines, les betteraves. Savoureuses et tellement décoratives avec leurs cardes multicolores, elles apportent un brin de « peps » aux compositions. Ouvrez l’œil, on les retrouve de plus en plus au beau milieu des ronds-points communaux. Leurs tiges vertes, blanches, jaunes et rouge écarlate attirent les regards. Dans la cuisine, les feuilles entourent les farces et font de bonnes quiches alors que les cardes sont gratinées ou cuites al dente puis marinées dans l’huile d’olive avec tomates, basilic et tutti quanti. Un régal.

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