L’automne, c’est sacré

Plus que jamais une saison clé, celle qui nous permet d’oublier les aléas de l’été, de nous relancer, de rectifier, faire des projets, cultiver l’avenir. Ne ratons pas ce rendez-vous !
A l'étang de Launay à Varengeville

Cet été, comme il y a deux ans, la sécheresse et les chaleurs étaient au rendez-vous alors que l’an dernier, les jardins étaient inondés, complètement noyés. Les conditions climatiques changent, les extrêmes apparaissent. Sachant qu’un jardinier sème toujours des graines d’optimisme et qu’un jardin est aujourd’hui plus que jamais un havre de paix et une valeur sûre, c’est LE MOMENT de résister, d’innover et de changer nos habitudes. Inutile de se lamenter… réfléchissons plutôt sur le long terme. Planter différemment, à d’autres moments ; mieux choisir la bonne plante pour le bon endroit, celle qui peut s’adapter aux changements du climat, – sécheresse, pluie diluvienne ou tempête, – et se débrouiller toute seule sans assistance. Economiser l’eau si précieuse, se simplifier la vie en connaissance de cause et tout simplement être à l’écoute de son environnement et de la nature. Chercher l’embellie et faire germer de nouveaux espoirs.

A nous les nouveaux défis, à nous la résilience heureuse …

Des feuillages magnifiques

Nyssa sylvatica

Généralement, l’automne est une saison qui annonce des récoltes plantureuses et des couleurs de feuillage somptueuses. Avant la chute des feuilles, le jardin a en effet encore de beaux jours devant lui. Sous une lumière plus douce, les verts s’estompent laissant s’enflammer les tons chauds d’or, de cuivre et de pourpre. Cette mystérieuse alchimie dépend des conditions atmosphériques, des alternances de pluie et de sécheresse, des coups de froid, des chaleurs et des plantes qui réagissent toutes différemment. Que va nous réserver 2023 ?

Cela dit, quelques végétaux sont champions dans le domaine. L’Euonymus alatus, fusain à feuillage caduc est un des premiers à annoncer l’automne avec ses petites feuilles rouge écarlate. Suivi de près par le Cercis canadensis ‘Forest Pansy’ aux délicates feuilles en forme de cœur dont les nervures rouge sanguin resplendissent à contre-jour, le Parrotia, le Liquidambar et les chênes d’Amérique. Sans oublier les érables japonais et A.palmatum, les amélanchiers, les cornouillers ; tous, ils exhibent un feuillage qui se métamorphose jusqu’en novembre. Les vignes, notamment Parthenocissus quinquefolia ou Vitis Coignetiae aux immenses feuilles ne sont pas en reste. Pour les fans de jaune, notons le majestueux Ginkgo biloba, l’arbre aux quarante écus, quelques rosiers tels les R. rugosa ou encore l’élégant Stephanandra tanakae, un arbuste au port en fontaine, dont le feuillage est indispensable dans les bouquets.

Encore des fleurs

Collection d’asters (Symphyotricum) de la Pépinière de la Source

Quelques vivaces montent au créneau. A commencer par l’aster dont on ne fait plus la réputation. Attention, après de nombreuses discussions scientifiques, le voici maintenant sous la bannière de Symphyotricum même si la plupart des jardiniers n’ont pas encore renoncé à son premier nom bien plus facile à retenir ! A condition d’avoir un peu de soleil, il se décline dans les tons de blanc, rose, violet, rouge rubis ou grenat. Il y en a pour tous les goûts : les grands, S. novae-angliae ou novii-belgii et les petits, S. x dumosus et entre les deux, quelques-uns comme S. lateriflorus et ericoides.

Avec eux, les chrysanthèmes de jardin, Dendranthema, aux couleurs variées entre le jaune, l’orange, le rose, le mauve et le blanc, les Solidago, Helenium et autres Rudbeckia, les orpins appelés Sedum ou Hylotelephium… sans oublier les charmantes anémones d’automne dont les fleurs blanches, rosées ou pourpres, simples ou doubles attirent tous les regards jusqu’aux premières gelées. Et puis, last but not least, les dahlias, – dont on met les tubercules à l’abri en hiver -,   n’ont pas encore fini de nous surprendre. Vous l’avez compris, il n’y a que l’embarras du choix. Au rayon des arbustes, quelques-uns tels les Hydrangea, Caryopteris, Perovskia, Ceratostigma, Leycesteria, Lespedeza, Vitex ou Clerodendron n’ont eux aussi, pas encore dit leur dernier mot.

Des graminées et des baies

Graminées et vivaces au Jardin Plume en Normandie

Les graminées, ces championnes de durée, décoratives plusieurs mois d’affilée, sont à leur apogée en cette saison. A la une des jardins contemporains, on les aime pour leur côté naturel et léger. La famille est nombreuse, il ne faut pas s’en priver, tant elles sont faciles et tant il y en a pour toutes les situations.

On ne pense jamais assez aux plantes à baies qui prolongent les floraisons jusqu’en hiver et persistent bien au-delà de la chute des feuilles. Celles des pommiers d’ornement, des sorbiers, viornes, cornouillers, aubépines, rosiers ou cotonéasters, dont les petits fruits se parent d’orange mais aussi de jaune, rouge, blanc ou rose et même bleu violacé chez le Callicarpa.

Des récoltes au verger et au potager

Cette année, les récoltes sont plus hâtives. Au verger, les poires, pommes, prunes, encore quelques framboises dites remontantes et quelques mûres. Au potager, le bilan est mitigé. Sans eau, il a bien souffert, alors que l’an dernier, tout y était noyé… Que faire sinon s’acclimater ?  L’auteur Didier Helmstetter, dans son ouvrage paru cette année aux Editions Tana, Le Potager du paresseux frappé par le changement climatique, en est convaincu. Avec un bon sens qui le caractérise, il propose d’expérimenter et de modifier le calendrier du potager : « Le plus simple est d’adapter nos cycles de culture à la nouvelle donne : cultiver quand c’est le plus facile, plus tôt au printemps, plus tard en automne et un peu durant l’hiver… innover davantage … ». L’occasion d’allonger la saison, de prolonger les récoltes en automne, de choisir des variétés adaptées et semer encore radis, mâche, épinard, chicorée, navet, roquette ou mesclun asiatique… En d’autres mots, ne restons pas figé dans nos façons de faire et risquons des défis, au risque de nous tromper.

A vos bêches

A Harlow Carr, sculpture

Plus d’hésitation ! Il est inutile de remettre vos plantations au printemps. C’est en octobre – novembre, voire décembre s’il ne gèle pas, qu’il faut se prêter à l’exercice. Les racines des plantes auront le temps de bien s’installer, de se développer sans stress et les arrosages fréquents ne seront pas au menu de l’été prochain. Une belle manière d’apporter sa pierre à l’édifice et devenir écoresponsable. Dès à présent, à vous de peaufiner vos choix, de n’accueillir que les végétaux les plus résistants et de ne plus céder à la tentation des achats non réfléchis qu’on ne sait où placer. Faites confiance aux pépiniéristes spécialisés et à leur expérience et surtout, surtout, n’oubliez pas de planter des arbres même dans les petits jardins ; ils refroidissent localement l’atmosphère tout en donnant de l’ombre et en apportant de la matière organique.

SOS Sécheresse

Le précieux livre d’Aurélien Davroux, Toutes les plantes supportant la sécheresse, paru aux Editions Ulmer en 2020, est un excellent départ de réflexions.  Ingénieur horticole et conseiller botanique pour des collectivités, il estime lui aussi qu’il faut changer nos habitudes face au réchauffement climatique pour soulager nos jardins mis depuis quelques temps à rude épreuve.

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