Les fleurs de l’automne

Si la splendeur des feuillages d’automne n’est plus à démontrer, les floraisons, elles, sont moins connues. Certaines, décalées, viennent quand on ne les attend plus
Rudbeckia 'Berlin'

La plupart des jardiniers le savent.  La troisième saison de l’année, généralement leur préférée, est un instant de grâce. Le jardin tire tranquillement sa révérence avec panache et générosité. Mais il a encore de beaux jours devant lui. La lumière se fait plus douce et rasante, les frissons de l’hiver sont encore loin et l’été vient de jeter ses derniers feux. Bienvenue aux floraisons, feuillages et fruits hauts en couleurs. La palette est assez uniforme, les tonalités chaudes priment. Elles se répartissent principalement dans la gamme chromatique allant du jaune au rouge. Toutes les couleurs intermédiaires, orangées, pourprées et cuivrées les nuancent. Les plantes vivaces font véritablement le spectacle suivies des arbustes, des bulbes et des annuelles.

Au rayon des vivaces

A tout seigneur tout honneur, l’aster, cette petite marguerite appartenant à une famille nombreuse offre une floraison tardive dans les tons de blanc, rose, violet, rouge rubis ou grenat. A condition d’avoir un peu de soleil. Les plus grands sont les anglais, Aster novae-angliae dont les centaines d’étoiles scintillent entre 80 et 1,50m de haut, puis viennent les belges, A. novii-belgii aux fleurs plus larges. Parmi eux, méfiez-vous des Ballard, dont le feuillage est vite sujet à oïdium. Les plus petits de la bande, les A. x dumosus forment des petits coussins alors que les A. lateriflorus et ericoides buissonnent. Sans oublier l’intéressant A. x frikartii à la longue floraison bleue et celui au nom à coucher dehors, A.  ‘Andenken an Alma Pötschke’, rose fuchsia. Des must.

Une autre marguerite alias Dendranthema ou chrysanthème prend assez vite le relais des asters et illumine les plates bandes comme personne. Enlevons-lui la triste étiquette de fleur de la Toussaint. D’octobre à décembre, elle exhibe les tons de jaune, orange, rose, mauve et blanc. Le grand classique des classiques, ‘Clara Curtis’ est précoce, ce qui est un plus. D’autres élégantes issues d’obtentions récentes montrent des fleurs doubles ou semi doubles.  Assez rustiques, les chrysanthèmes se plaisent dans un sol ordinaire mais attention aux limaces, elles les  dévorent au printemps quand les jeunes pousses sortent de terre.

Bon enfant

Le sedum est une plante de grand-mère ou de jardin de curé par excellence. Les grincheux lui reprochent parfois un feuillage grossier et épais caractéristique des plantes grasses. Et pourtant, jamais malade et très écolo, il attire une nuée de papillons. A la fin de l’été, ses fleurs rondes et plates virent du vert au rose ou au rouge. Puis au milieu de l’automne au pourpre. En hiver, son inflorescence sèche reste décorative au jardin ,en pot sur la terrasse ou en bouquet à l’intérieur de la maison. La variété ‘Herbstfreude’ appelée aussi outre Manche ‘Autumn Joy’ est une valeur sûre. On la repère dans de nombreux jardins. Notez qu’il existe aussi des variétés au feuillage pourpre ou panaché et d’autres à la floraison blanche.

Enfin, last but not least, la délicate anémone d’automne. Dans les coins d’ombre, son port altier attire tous les regards. Dès le milieu de l’été et jusqu’aux premières gelées, ses fleurs blanches, rosées ou pourpres, simples ou doubles se balancent à environ 1m de haut. Un véritable record de floraison. Différentes sélections se volent la vedette. ‘Honorine Jobert’, la blanche, ‘September Charm’ la rose, ‘Pamina’ la pourpre ou ‘Köningin Charlotte’ la double rose et ‘Whirlwind’ la double blanche. Parfaitement rustique, une fois qu’elle est installée, elle ne vous quittera plus.

Les soleils jaunes

C’est aussi le temps des « soleils » qui se bousculent au jardin. Les tournesols, Helianthus mais aussi les Helenium, Boltonia, gerbes d’or et autres Rudbeckia. Ils égaient  l’automne et font l’unanimité. Quelques-uns, considérés parfois comme un peu ringards, reviennent en force. En tête, les hélénies. Elles s’associent terriblement bien avec les graminées mordorées et les gerbes d’or, ou Solidago aux minuscules fleurs regroupées en bouquets.  Ces dernières ont le bon ton de ne pas se ressemer si on coupe à temps leurs inflorescences fanées. Quant aux rudbeckias aux tiges bien droites, ils restent décoratifs en l’hiver alors que les tournesols prodiguent leurs graines sans compter à la gent ailée.

D’autres moins utilisées

Bien d’autre plantes vivaces attendent la fin de l’été pour s’épanouir et donner le meilleur d’elles-mêmes. A l’ombre, l’aconit d’automne, Aconitum arendsii, aux longs épis d’un bleu profond tient compagnie aux anémones et le cierge d’argent, Cimicifuga appelé dorénavant Actaea, – merci les botanistes – embaume le jardin à lui tout seul. Son inflorescence ressemble effectivement à un cierge. La variété A. simplex ‘White Pearl’ est au top de même que  A. ‘Brunette’ au feuillage d’une magnifique couleur pourpre. La persicaire, Persicaria amplexicaulis ou Polygonum amplexicaule  est  indispensable dans les plates bandes en fin de saison. Sa période de floraison se révèle fort longue et ses épis légers acceptent l’ombre. Que vouloir de plus ? Quelques sauges sont encore au rendez-vous. Notamment la belle Salvia uliginosa d’un bleu fameux, pas toujours rustique chez nous et le Tricyrtis formosana, style d’orchidée pas si difficile à cultiver comme certains le laissent penser, à condition que la terre soit humifère.

Le roi Dahlia

Le dahlia reste fidèle au poste. Pas vraiment vivace, – on rentre ses tubercules en cave en hiver -,  il ne demande qu’à s’entendre avec le jardinier. Irremplaçable dans les potagers, les mixed borders et les décorations florales d’arrière-saison. Nain ou géant, de 30 cm à 2m, au feuillage vert clair ou pourpre très foncé, il a des couleurs et des formes de fleurs très différentes. Régulières, ébouriffées, immenses ou minuscules comme un cactus, un pompon,  une anémone, une pivoine ou un camélia. Il produit des myriades de fleurs jusqu’aux premières gelées si on enlève régulièrement les fleurs fanées. Acceptant n’importe quel sol pourvu qu’il soit riche, il affectionne le plein soleil, réminiscence de ses origines mexicaines et un peu d’eau en cas d’éventuelles périodes de sécheresse estivale. Sans oublier le tuteur exigé pour les grands formats dont les tiges casseraient au premier coup de vent. Cerise sur le gâteau, il tient environ une dizaine de jours en vase lorsqu’il est cueilli au début de son épanouissement.

En leur compagnie

Parmi les arbustes, quelques-uns n’ont pas encore dit leur dernier mot. Les fleurs des hydrangeas dont Hydrangea serrata ‘Precioza’ changent de couleur jusqu’au premier gel, les Caryopteris, Perovskia et Ceratostigma se couvrent encore de petites fleurs bleues alors que le Leycesteria, l’arbre aux faisans nous révèle ses grappes de clochettes crème parfois déjà doublées de jolies baies pourpre. Souvent confondu avec le Leycesteria, le Lespedeza, au port souple et retombant, déverse ses cascades de fleurs rose magenta. Dommage qu’on ne le voit pas plus souvent dans les jardins tout comme le Clerodendron magnifique à l’abri des vents froids.    

Les bulbes ne sont pas en reste. C’est le moment d’admirer les colchiques, cyclamens, crocus d’automne et autres Schizostylis au look de petit iris réservés aux jardiniers expérimentés. Les baies prolongent l’automne jusqu’au creux de l’hiver. Sauf lorsque les oiseaux friands de ces mignardises s’y attardent. Blanches, jaunes, roses et rouges pour les pommiers d’ornement, sorbiers, viornes, cornouillers, aubépines, Cotoneaster et rosiers alors que le surprenant Callicarpa se pare de baies bleu violacé.

Quant aux graminées, ces championnes de durée, décoratives plusieurs mois d’affilée, elles relaient les plantes vivaces épuisées dont les tiges s’effondrent et les fleurs se fanent. Fidèles, elles assurent la permanence pendant le temps de repos des partenaires.

Réjouissons-nous ! C’est à l’automne que l’on plante pour les mois à venir.

Astuce botanique

Pourquoi ce décalage ? Les plantes à la floraison décalée sont principalement originaires de l’hémisphère sud. Elles ont gardé l’inversion des saisons dans leur cycle annuel. Le printemps là-bas étant l’automne chez nous. Par ailleurs, certains végétaux comme le chrysanthème ont besoin de plus de 9h d’obscurité pour former des boutons floraux. D’autres comme le colchique attendent le retour du froid pour fleurir.

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