Mettre son jardin en lumière n’est pas toujours évident. Les jardiniers le savent autant que les photographes. Jouer avec l’ombre et la lumière est généralement la clef de la réussite. Au Japon, c’est un sport national. Si, l’éloge de l’ombre, – titre d’un livre merveilleux de Junichirô Tanizaki aux Éditions Verdier– traduit un sens de l’esthétique assez particulier à l’intérieur des maisons, il garantit également la lumière des extérieurs. Là-bas, tout est dialogue entre l’espace intime et la nature environnante. Sans doute une des dualités les plus essentielles de la culture japonaise, le yin et le yang, l’obscurité et la lumière. Un univers empreint de sensibilité qui peut nous inspirer. Comment faire ?
Miroir d’eau indémodable

Le bassin où l’eau est immobile est une scène récurrente dans les jardins du Japon. Et lorsqu’un pavillon ou mieux un arbre se mirent dans l’eau, c’est la voie du paradis. L’arbre vivant et son reflet semblent se joindre. Ensemble, ils suscitent une réflexion : réel ou imaginaire ?

Les jardins baroques d’Europe comptaient eux aussi des miroirs d’eau pour faire entrer le ciel et la lumière dans les jardins et agrandir visuellement l’espace. Avec André Le Nôtre, les parterres d’eau de Chantilly en sont un exemple fastueux tout comme le grand canal de Versailles dans l’axe du château, véritable coulée lumineuse dans le parc.
Aujourd’hui, ce thème est toujours d’actualité. Nombre d’architectes paysagistes l’utilisent encore. Au Jardin Plume en Normandie, jardin contemporain dédié aux graminées et aux plantes vivaces, l’effet est saisissant. Dans la prairie divisée en différents carrés d’herbe spontanée, un carré d’eau, aux mêmes dimensions, à fleur de pré, magique, reflète les nuages.
Cela dit, l’effet miroir même sans eau, est toujours intéressant même si parfois sophistiqué ou insolite. Derrière un massif, au bout d’une allée, sur un balcon ou une terrasse, il crée des jeux de reflets, ouvre des perspectives et des fenêtres ou met simplement un décor en valeur. Bien positionné par rapport à la course du soleil, il crée l’illusion.
Taille en transparence

A la mode dans les jardins depuis quelques temps, la taille douce ou en transparence est une véritable méthode au service de la lumière. Pour la laisser se glisser entre les branches. Au plus grand bonheur des oiseaux qui aiment traverser les ramures en toute liberté. En pratique, il s’agit tout simplement d’alléger un arbre ou un arbuste de l’intérieur. Muni d’un bon sécateur, le jardinier commence par couper le bois mort ou malade. Puis les brindilles trop fines qui ne donneront jamais rien de bon. Sans oublier les doublons, les branches rebelles, celles qui sont trop longues et les rejets développés après un élagage trop sévère. En dégageant le tronc à la base, il le rend plus visible tout en redessinant une silhouette gracieuse presqu’aérienne et en respectant le port naturel du végétal. Les feuillages seront plus colorés et les floraisons plus abondantes, mieux réparties, également sur les branches inférieures.
Dualité au jardin

C’est indéniable, les formes et les couleurs des végétaux n’existent que par la lumière qui les met en valeur et les accentue. Dans les compositions paysagères, les alternances des zones sombres et éclairées font toujours recette. Au XVIIIe, dans les jardins paysagers, le visiteur allait de surprise en surprise, le regard tantôt habitué à l’obscurité en traversant un bosquet ou une grotte, tantôt ébloui par la lumière et les couleurs.
Pour réaliser ces coups de théâtre, plusieurs propositions. Pour suggérer l’ombre, il est judicieux d’installer des masses de végétaux aux couleurs pourpres voire noires ou de planter les arbres et arbustes de manière rapprochée dans l’idée de former un bosquet. En revanche, pour éclairer des zones tristes, vaincre le ciel maussade ou susciter lumière et gaieté, rien de tel que des plantes au feuillage doré ou argenté voire panaché et des floraisons claires voire immaculées. Le blanc est en effet la dernière couleur perçue par l’œil à la tombée de la nuit. Tout en prenant garde de laisser entrer les rayons du soleil dans les massifs, créer des puits de lumière par de larges ouvertures vers le ciel ou privilégier des végétaux à feuillage caduc.
Les matériaux clairs vont aussi réfléchir la lumière naturelle du jour et ajouter de la clarté au lieu. Un dallage blanc, beige, des galets ou de la dolomie auront plus d’effet que le schiste ou la pierre bleue. Cela dit, peindre un vieux mur de briques ou de parpaing gris en blanc est aussi une astuce qui ne trompe pas.
Lumière artificielle

Pourquoi ne pas illuminer son jardin pour en profiter la nuit tombée ? Pourquoi ne pas souligner un espace en particulier ? Un arbre remarquable ou un joli décor ? L’ambiance est alors bien différente de celle de la lumière du jour. Ceux qui jugent la solution trop irréelle peuvent se rabattre sur les bougies, torches, lampions, lanternes, guirlandes lumineuses et braseros qui nous invitent à cette période de l’année à vivre la douceur et la magie des fêtes. Amusez-vous ! Par les temps qui courent, cela fait du bien …