
A environ 60 km de Cape Town, au cœur de vignobles légendaires où les Chardonnay et autres Pinot noir font la loi, non loin de la charmante petite ville de Franschhoek, se développent paisiblement, les jardins de Babylonstoren, en référence à une montagne voisine du même nom. Autour d’une ferme traditionnelle de style hollandais « Cape Dutch » de la fin du XVIIème, derrière des murs blanchis à la chaux, ces jardins, – à la fois ornementaux mais aussi et surtout nourriciers -, font exception dans un magnifique décor montagneux de carte postale. Karen Roos, éditrice de magazines de décoration et son mari Koos Bekker, homme d’affaires, passionné de botanique et d’histoire, ont décidé en 2007 de restaurer cet immense domaine de 200 ha et d’y créer un éden exubérant, beau et gourmand. Pour accéder à leur rêve, ils font appel à Patrice Taravella, architecte paysagiste français réputé notamment pour ses fabuleux jardins du prieuré Notre-Dame d’Orsan non loin de Châteauroux dans le Limousin. Une réhabilitation réalisée de main de maître. Ensemble, ils transforment les terres abandonnées de Babylonstoren en un lieu accueillant et unique, réunissant au fil du temps un jardin contemporain, un restaurant gastronomique et un hôtel de charme. Tout un programme pour un jardin des délices.





Tradition et modernité
Comme à Orsan, Patrice Taravella commence par entreprendre une recherche historique. Avec les époux Roos-Bekker, il n’y a qu’une évidence et une seule voie à suivre, celle du Company’s Garden, à Cape Town, un jardin historique de la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales, qui au XVIIème siècle approvisionnait les bateaux et grands navires sur leur route entre l’Europe et l’Asie. Le Cap était une étape idéalement située à la moitié de ce long périple, et permettait aux marins de faire des provisions de légumes notamment des tubercules suffisamment résistants et des fruits, tels des agrumes riches en vitamine C. A l’époque, au pied de la célèbre Table Mountain, on expérimentait un nombre impressionnant de plantes et de graines venues de tous les coins du globe.
Ici, à Babylonstoren, l’idée est de maintenir ces traditions horticoles tout en créant un conservatoire de variétés anciennes et aussi de développer un jardin expérimental pour essayer et acclimater des légumes nouveaux, le tout, en respectant les principes du jardinage écologique.



Géométrie et structures

La trame de ce jardin est basée sur un dessin géométrique et formel qui rappelle celui des jardins de paradis en Orient, notamment en Perse. L’ensemble est traversé d’est en ouest par un axe principal entrecoupé d’allées de gravier, gazon ou noyaux de pêches dont la plus importante est l’allée des goyaviers centenaires. Au centre de la composition, le jardin des agrumes. Tout autour, des chambres de verdure carrées ou rectangulaires, plus ou moins grandes, sont entourées de murs ou de haies. Elles sont vouées à telle ou telle culture selon des thèmes bien précis : les indigènes, le labyrinthe, le potager expérimental, le verger, le coin des figuiers de barbarie…



Pas de jardin sans eau. C’est une certitude pour qui rêve de paradis. Un grand réservoir alimente des bassins et des canaux ainsi que de longues rigoles creusées dans l’argile qui rappellent les oasis accueillantes du sud. L’irrigation est naturelle, elle se réalise par simple gravité, toute la surface du jardin étant en légère pente. La circulation de l’eau est toutefois judicieusement contrôlée par l’ouverture de petites écluses en fonction des besoins des plantes.


Pour donner de la hauteur à un dessin somme toute assez plat, Patrice Taravella propose, comme à Orsan, de placer aux croisements des chemins et aux endroits cruciaux, des gloriettes ou grandes structures pyramidales faites en échalas de bois. Envahies de rosiers grimpants, comme l’immaculée Mme Alfred Carrière, la ‘New Dawn’ rose nacré ou l’Albertine’, rose plus soutenu, elles offrent parfums et couleurs pendant toute la saison. Elles donnent aussi du relief à l’ensemble, comme un petit clin d’œil aux montagnes environnantes.



Tout doit être comestible






A Babylonstoren, plus de 350 plantes sont comestibles, même les herbes dites mauvaises. A côté des légumes et des aromatiques, beaucoup de fruits ; le verger occupe d’ailleurs près de la moitié de l’ensemble. Des pommes, poires, coings, nectarines et autres agrumes, des pistachiers, myrtilliers et autres petits fruits, des goyaviers, figuiers, manguiers, avocatiers, caféiers, bananiers … Certains sont palissés pour un meilleur rendement et la beauté de leur forme.



Les collections botaniques ornementales préférées des époux Roos-Bekker sont disposées à l’écart. Celle des cycas, – plantes primitives à feuillage persistant – ou des cactées et le long de la rivière, celle des clivias, belles indigènes aux trompettes jaunes et orange de la famille des Amaryllidacées. Réunissant quelques 7000 plantes, elle est unique au monde et fait déplacer les foules au printemps.


En pratique
Babylonstoren,
Klapmuts, Simondium Road, Simondium, 7670, Afrique du Sud