
Il y a 3 semaines, nous avons enfin eu l’occasion de visiter le fameux Hermannshof situé au cœur de la petite ville de Weinheim en Allemagne, à environ 4h d’ici. S’il est vrai que notre univers jardinier est généralement dirigé vers le nord, des Pays-Bas au Royaume-Uni ou vers l’ouest en France, l’est et plus particulièrement l’Allemagne, regorgent également de perles incontournables. Quelques pépiniéristes d’avant-garde comme Georg Arends, Ernst Pagels ou Karl Foerster pour ne citer qu’eux, ont depuis de nombreuses années développé, sélectionné et élargi la gamme des plantes vivaces et surtout celle des graminées ornementales bien adaptées à nos jardins actuels. A leur suite, de nombreux architectes paysagistes et jardins d’exception.



Un jardin familial devenu public

A la fin du XIXème siècle, Hermann Freudenberg appartenant à une famille d’industriels, compose autour d’une grande demeure, un jardin planté de végétaux rares ou inhabituels. Aujourd’hui, sa structure n’a presque pas changé. L’ensemble de 2,3 ha est constitué notamment de parterres fleuris, de sous-bois, d’un étang, d’une pelouse et d’une prairie. Le tout est rehaussé d’arbres remarquables tels les Magnolia, Metasequoia, Sequoiadendron giganteum ou Gingko biloba ainsi que des cèdres et platanes. Sans oublier un vénérable myrte évoquant la méditerranée, Myrtus communis, planté en 1879 et obtenu à partir d’une bouture prélevée sur la couronne de mariée de Madame Freudenberg. En 2017, ce seigneur du lieu devenait un des champions d’Allemagne.

Dans les années 80, pour éviter un projet immobilier qui aurait détruit ce havre de verdure, la famille et la ville de Weinheim créent une fondation pour le maintenir, développer un jardin d’essai, en assurer la gestion et l’ouverture au grand public. Une nouvelle vie commençait alors pour ce domaine réinterprété dans une version plus proche de la nature, avec moins d’entretien.




Vivaces et graminées au rendez-vous
Le concept de plantations naturalistes était nouveau à l’époque. L’idée était de respecter les différents habitats, ensoleillés ou ombragés, secs ou humides et en y plantant les végétaux ad hoc, -surtout des plantes vivaces et des graminées -, qui s’y débrouilleraient tous seuls. Sachant que Weinheim est situé dans une des régions les plus chaudes du pays, la palette des plantes est riche et variée. Quelques Erythrina crista-galli ou érythrines têtes de coq d’Amérique du Sud le prouvent en poussant en pleine terre à l’entrée du jardin.


Le New german style était né. Ce que plusieurs appellent aussi : New Perennials ou Dutch wave, en référence au mouvement mené par les Néerlandais Henk Gerritsen et Piet Oudolf. Peu importe. Derrière tous ces noms, le fil rouge est le même : la grande prairie nord-américaine. Tous s’en inspirent de près ou de loin dans leurs créations.
Cassian Schmidt, directeur depuis 1998, met Hermannshof sous les feux de la rampe. Avec lui, la théorie se mêle à la pratique, les connaissances scientifiques à l’esthétique. Les plantations sont denses mais simplifiées, – le nombre de plantes différentes étant réduit -, les vivaces colorées sont choisies avec soin et relevées par des graminées pour apporter mouvement, légèreté et verticalité. La connaissance des plantes devient primordiale. Grâce à elles, une autre manière de structurer le jardin : l’ensemble étant rythmé mais contrasté par des petites mises en scène répétées, toujours différentes en fonction des saisons. En collaboration avec différentes universités et la pépinière du jardin, il établit des schémas de plantation, véritables modèles à reproduire en tout ou en partie notamment par les collectivités publiques.
Différents jardins




L’ensemble du domaine est divisé en plusieurs parcelles. Une prairie avec des plantes frugales adaptées aux étés secs à l’avant de la maison, un sous-bois planté de nombreux couvre-sol, une zone méditerranéenne, une autre humide au bord de l’étang, des grands massifs voués aux graminées et aux vivaces et un parterre aux couleurs chaudes à la gloire des annuelles. Mi-septembre, la première prairie était vraiment desséchée après cet été brûlant alors que la plupart des autres parties étaient encore fort arrosées.






Mais ce sont les grands massifs derrière la maison qui ont attiré toute notre attention. Dans cet espace dégagé, le sol argileux est propice aux grandes vagues de la prairie nord-américaine. A la fin de l’été, les tons sont chauds et lumineux grâce aux soleils d’automne comme les Rudbeckia, Helenium, Heliopsis et Helianthus, mais aussi grâce aux dahlias qui se faufilent dans la trame. Quelques vivaces à la belle silhouette comme les échinacées ou les Phlomis ont terminé leur floraison mais restent présentes avec leurs têtes sèches presque noires qui offrent un joli contraste dans la lumière rasante. Les graminées sont omniprésentes. Elles soulignent les chemins, apparaissent telles des fontaines au centre des parterres, ponctuent l’ensemble avec légèreté et transparence. Impossible de toutes les nommer tellement elles sont représentées. Mais, comme elles sont bien étiquetées, c’est un vrai régal pour l’amateur averti.







Y aller
Babostrasse 5 à 69469 Weinheim Ouvert tous les jours de 10 à 18h, entrée gratuite https://Sichtungsgarten-hermannshof.de

Pour en savoir plus
Essayez de dénicher cet ouvrage malheureusement épuisé : Le jardin d’Hermannshof, de Philippe Perdereau et Cassian Schmidt, Editions Ulmer, Paris, 2013, ISBN 9782841385683