Qu’on se le dise, l’année 2016 sera résolument british ! Pour tous les amateurs en quête de merveilleux jardins à découvrir outre-manche, elle sera festive. En effet, quelques lieux somptueux seront à l’honneur à l’occasion du 300ème anniversaire de la naissance du célèbre paysagiste Lancelot dit Capability Brown. Qui est-il ? Il est à l’Angleterre ce qu’André Le Nôtre est à la France. Et il est au jardin ce que Shakespeare est à la littérature. Un monument ! Laissant une œuvre magistrale de centaines de parcs et jardins ! De Blenheim Palace à Kew gardens, tout un programme !
Jardin botanique de Kew avec la pagode de Chambers
A la française ?
Si l’amour du jardin est le point commun entre Brown et Le Nôtre, un siècle les sépare. Et pas seulement. Dans un jardin « à la française » triomphent rigueur, géométrie et symétrie. Tout y est contrôlé, équilibré à la gloire du pouvoir absolu du roi Louis XIV, le roi soleil. A Versailles et partout ailleurs en France et en Europe, on voit grand. De vastes esplanades, des parterres, lignes droites, miroirs d’eau, canaux, fontaines, topiaires, vases, statues et broderies de buis en XXL.
A l’anglaise ?
Un siècle plus tard apparait le « jardin à l’anglaise ». Complètement différent. Rien à voir avec les jardins structurés et les compositions géométriques. Au contraire. Le rapport à la nature change. Plus question de la dominer. Cette fois, il est l’heure de paysager le jardin en supprimant les murs d’enceinte, en ouvrant la vue sur l’environnement, en rendant hommage aux douceurs de la campagne et du paysage arcadien. Le landscape gardening nouveau est arrivé. Un style irrégulier et « dégéométrisé » aux lignes sinueuses et arrondies, gages de liberté. De vastes ondulations de gazon, des vagues de collines, une rivière serpentine, des lacs aux contours souples, des arbres disposés en bosquet, tel est dorénavant le tableau. Tout y parait si naturel alors que tout est apparence.
Jardin de Scampston
Vous avez dit Capability ?

Lancelot Brown (1716-1783), le plus grand jardinier du royaume, parfait autodidacte, a fait ses premières armes dans le déjà très célèbre parc de Stowe (Buckinghamshire) appartenant à Lord Cobham avant de parcourir l’Angleterre entière. On le dit éminemment naturaliste voire même puriste ; en effet, il ne versera jamais dans certains artifices truffés de chinoiseries et ruines antiques utilisés par quelques-uns de ses contemporains. Il est vrai qu’à cette époque, qui dit jardinier dit aussi créateur de « fabriques », ces constructions de jardin tels des temples, grottes, kiosques ou ponts. Avec elles, le jardin devient une véritable mise en scène parsemée de décors de théâtre installés dans le seul but de créer des effets de perspectives.
A Scampston
Lancelot Brown doit son surnom de Capability à son habitude d’insister sur les capacités d’un lieu à se transformer en jardin paysager. Il a le don, avec une élégance innée mêlée à une certaine simplicité, de percevoir le genius loci, génie du lieu, de relier le jardin à la campagne. Pour y parvenir, il n’a même pas peur d’enlever murs et haies. Sa devise ? Aménager un lieu avec la sensibilité d’un poète et le regard d’un peintre. A méditer.
A Scampston
Des centaines de jardins
Un nombre incalculable de km² de jardins lui sont attribués. Pendant toute sa vie, infatigable, notre paysagiste devenu Master gardener royal sillonne l’Angleterre au service d’une clientèle privée importante. Ceci dit il est clair qu’ayant fait école, beaucoup d’élèves ont travaillé à sa manière. Aujourd’hui bon nombre de paysagistes sont encore influencés par cette œuvre magistrale. 250 jardins environ seraient signés de la main de Capability. De Blenheim Palace aux environs d’Oxford à Kew Gardens à Londres, ses deux compositions les plus célèbres, en passant par d’autres noms évocateurs comme Stowe, Hampton Court, Prior Park, Chatsworth, Scampston pour ne citer qu’eux.
A Scampston